A family history blog in French and English

Sanford-Springvale, Maine, Railroad Station, early 1900s. Collections of the Sanford-Springvale Historical Society.

Saturday, March 16, 2019

Partie I : La famille de Delvina Demers et Joseph Bourassa


Le jour de noces de Joseph Bourassa, 28, et Delvina Demers, 30, 23 juillet 1888 à Saint-Fortunat. À cause de la mort de son père il y a 15 ans, Delvina avait demandé son beau-frère, Hilaire Aubin, le mari de Marie Euphrasie, de représenter son père dans l’église. En 1888 Joseph et Delvina se connaissent depuis 12 ans, quand Joseph et ses six frères et sœurs et sa mère veuve, Rose Olivier Bourassa, s'installent à Saint-Fortunat dans une ferme au 7ème rang par loin de la ferme Demers au 6ième. Contrairement à sa sœur aînée et unique, Marie Euphrasie, Delvina ne s’est pas mariée avant d’être relativement âgée. Pendant sa vie, elle semble toujours à agir avec délibération et détermination, caractéristiques qu’elle partageait avec Joseph, de qui leur fille Angélina écrirait dans un mémoire, “Il s’organisait lentement mais sûrement.”
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Des Notes du Voyage de

Télesphore Demers et Odelie Demers

Juillet 1908
Le lendemain, nous nous sommes rendus chez mon oncle Joseph Bourassa, toujours accompagné de Fortunat [Demers] et Hilaire [Aubin, fils], qui remplissaient la charge de charretier. Délienne [Aubin Lambert], sa petite fille, Apolline, et Alphonsine [Demers] se rendirent avec nous autres. Après avoir pris le dîner, nous sommes allés prendre un peu d'exercice tout en allant manger des fraises qui n'étaient pas en très grandes abondances, et nous avons été dérangés par la pluie, aussi, qui est tombée à verse une partie de l’après-midi. 
Les Notes de Voyage d’Odelie Demers, p. 58.

Août le 13, 1908
Il a mouillé toute la nuit. À neuf heures, nous partons pour aller chez Joseph Bourassa. Il fait une bonne pluie qui se continue tout l’avant-midi et encore quelques petites ondées dans l’après-midi. Ils étaient tous en bonne santé et paraissent vivre assez bien. Je vais faire une visite sur sa terre. Elle est en bon ordre, le grain est bien moyen. Il garde des cochons pour le commerce. À sept heures du soir Eusèbe Lamontagne et sa dame, [et] D’Assise Guay et sa famille sont venus nous faire une veillée de minuit. Nous nous sommes bien amusés. Nous avons parlé de tout à qui intéressent les cultivateurs.
Les Notes de Voyage de Monsieur et Madame Télesphore Demers, p. 64.

Septembre le 5, 1908
Beau soleil et froid. À huit heures du matin le temps se couvre, mais à neuf heures du matin il fait beau soleil et chaud. À dix heures, on se rend chez Joseph Bourassa. Il est au neuvième rang. Il est allé approcher des billots au moulin à scie avec ses deux garçons. À cinq heures et trente minutes, il fait beau et chaud. À huit heures et trente minutes, Joseph arrive du moulin. À neuf heures et trente minutes, on se couche.
Les Notes de Voyage de Monsieur et Madame Télesphore Demers, p. 84.

Septembre le 12, 1898
[Le temps] est beau et froid. On se prépare pour Saint-Camille. Je règle mes affaires avec Joseph Bourassa. 
Les Notes de Voyage de Monsieur et Madame Télesphore Demers, p. 88-89.
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C’est quand que Delvina et Joseph se sont-ils rencontrés pour la première fois? Certainement pas plus tard que 1876 avec l’arrivée à Saint-Fortunat-de-Wolfestown de Saint-Nicolas de la famille Bourassa lorsque Joseph avait 16 ans et Delvina, 18. Peut-être elle l’a vu quand sa mère et ses frères et sa seule sœur avaient emprunté le chemin du 6ème rang dans un wagon et quelques chevaux et passé devant la ferme de Demers pour se rendre pour la première fois à leur nouvelle terre sur le 7ème rang. Ou plus probablement, ils se sont rencontrés après la messe le dimanche suivant, lorsque la famille Bourassa est jointe avec tout le monde sur les marches de l'église du village. On imagine Joseph, plus jeune d'elle de deux ans, timide et calme, n'échangeant pas un seul mot avec Delvina car sa famille était entourée d'une foule turbulente, presque tous inconnus de lui. Delvina l'a-t-elle même remarqué? Ou était-elle peut-être plus intéressée à rencontrer sa mère ou sa sœur Marie-Anne, âgée de 14 ans, et à jaser avec elles?

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Delvina et Joseph se sont peut-être rencontrés pour la première fois en 1876 sur le perron devant l’église de Saint-Fortunat. Et c'est ici qu'ils se sont mariés en 1888 et que tous leurs enfants seraient baptisés. La photo montre un groupe de paroissiens rassemblés devant l'église, construite de 1872 à 1873, comme elle apparaît de 1884, année de l'ajout du clocher, à 1901.

(Photo des archives de la municipalité de Saint -Fortunat, Québec,
et publié dans Vaillancourt, Éric, Histoire de Saint-Fortunat (Québec 2013) 103.)
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La vie de Delvina avant son mariage

Delvina est née à Saint-Gilles-de-Beaurivage en 1858 dans la partie de la municipalité qui devint plus tard Saint-Agapit. Tous ses ancêtres Demers avaient vécu à environ 15 miles de son lieu de naissance, principalement à Saint-Nicolas-de-Lauzon, depuis près de 200 ans. Seulement un an de sa naissance, ses parents et ses quatre frères, ainsi qu sa seule sœur et son mari, s’installèrent dans le canton de Wolfestown, où ils défrichent de la forêt et deviennent les premiers cultivateurs sur leur terre au 6ème rang. (Beaucoup plus tard, Télesphore, le frère de Delvina, dira à son petit-fils Edmund Demers que son père, Damase, a été le premier homme qui a pris une hache contre les arbres sur leur terre.) Dans les premières années, ils font partie de la paroisse de Saint-Julien-de-Wolfestown, mais plus tard, ils appartiennent à la paroisse et à la municipalité de Saint-Fortunat lorsqu'elles ont été créés en 1871 et 1873, respectivement. (Pour plus d'informations sur l'histoire de la famille de Delvina et son déménagement à Wolfestown, voir les précédentes postes du blog aux sujets de la famille de sa sœur, Marie Euphrasie Demers, et son beau-frère Hilaire Aubin, ainsi que les postes sur la généalogie des familles Demers et Lamontagne.)

À peine âgée d'un an à son arrivée à Wolfestown, Delvina n'aurait aucun souvenir de la vie à la ferme de Saint-Agapit, avec ses vastes champs plats non loin de la rive sud du grand fleuve Saint-Laurent et les maintes fermes de près. Ses premiers souvenirs étaient plutôt de la nouvelle ferme dans la forêt et des pentes abruptes de l'étroite vallée de la rivière Bulstrode sur laquelle leur terre reposait; en ce sens, elle était entièrement issue des Cantons-de-l’Est et des contreforts des Appalaches. Sa longue vie serait presque entièrement centrée sur la paroisse de Saint-Julien et puis celle de Saint-Fortunat, mais pendant ses 30 premières années, elle serait encore plus étroitement axé sur un tronçon de l'extrémité nord-ouest du chemin de 6ème rang. Cette jeune vie, bien que sur un rang isolé, était sociale dans l'extrême et vivait dans un voisinage très serré et étonnamment peuplé, composé principalement de jeunes membres de la famille qui habitaient dans des modestes fermes situées en face de la route, à deux kilomètres de la ferme familiale.

En 1859, la famille proche de Delvina comprenait son père Damase, âgé de 49 ans, et sa mère Euphrosine, 42 ans. Sa sœur unique et la plus âgée de la famille, Euphrasie, 19 ans, était déjà mariée depuis trois ans à Hilaire Aubin, 29 ans. Le couple était également arrivé en 1859 (sinon, peu de temps après) et avait probablement contribué à l'établissement de la ferme de Demers avant de créer la leur quelques années plus tard de l'autre côté du chemin sur le 5ème rang, où ils élèveront leurs neuf enfants, dont trois sont morts dans l'année suivant leurs naissances. Théodore, le frère aîné de Delvina, âgé de 20 ans, vivait toujours à la maison en 1859, mais épousera Philomène Lamontagne en 1862. Eux aussi installèrent une ferme sur la route où ils auraient 13 enfants, dont deux mourraient avant leur premier anniversaire. Le frère suivant, Damase, 17 ans, a épousé Rebecca Lantagne en 1864. Ils ont également établi une ferme sur le chemin et auront huit enfants. Télesphore avait douze ans en 1859 et épousera une autre fille Lamontagne, Henriette, en 1869. Ils semblent avoir toujours vécu dans la ferme de son père, où ils figurent au recensement de 1871 avec leur premier enfant Télesphore, ses parents et sa sœur Delvina. Ils seront 13 enfants. Louis-Ferdinand, âgé de 10 ans en 1859, épousera Marie-Sabrina Paradis à Saint-Raphaël en 1870. Louis-Ferdinand, comme adulte, était le seul frère de Delvina à ne pas s'établir sur sa propre ferme à Saint-Fortunat. Le plus jeune frère, Octave-Alexis, trois ans en 1859, a décédé en enfance en 1865.

Et puis il y avait beaucoup de cousins ​​de Delvina. Du côté Demers de sa famille, il y avait son cousin germain, Isaïe Demers (le fils de l'oncle Magloire), né à Saint-Nicolas ou à Saint-Agapit et son épouse Sophia. Ils avaient deux enfants lors du recensement de 1871. En outre, il y avait plusieurs fils et beaux-fils d'un autre oncle, son oncle Germain Demers. Honoré, né à Saint-Nicolas, s’établit au 6ème rang au début des années 1860 et épousé une autre fille de Simon Lamontagne, Victoria, en 1865. Ils avaient 11 enfants. Le frère de Honoré, Évangéliste, s’y installait également à peu près au même moment; en 1866, il a épousé Adélaïde Boucher et ils avaient 10 enfants, dont l'un a décédé à 3 mois et un autre à 16 mois. Parce que Germain, le père d’Évangéliste et de Honoré, avait épousé la mère veuve de Hilaire Aubin, Hilaire n’était donc pas seulement un beau-frère de Delvina, mais aussi un beau-cousin. Un autre beau-cousin, le frère de Hilaire, Barthelemi Aubin, s’est également installé sur la route du 6ème rang au début des années 1860. Il a marié Elisabeth Dupere en 1860 et ils avaient neuf enfants.

Chez les Lamontagnes, la famille de la mère de Delvina, il y avait la famille de Simon Lamontagne, l’un des cousins germains de sa mère. Simon avait été élevé à Saint-Antoine-de-Tilly, où il avait courtisé et épousé Marie-Madeleine Legendre en 1842. Ils ont été parmi les premiers colons français dans le canton de Wolfestown, ayant défrichait une terre vers 1846 dans une partie du nord-ouest de Wolfestown qui avait été cédé à la municipalité de Saint-Ferdinand-d'Halifax. Au début des années 1860, ils s'installèrent dans le 5ème rang du côté nord du chemin de 6ème rang et non loin de la ferme familiale de Delvina. Simon et Marie-Madeleine avaient dix filles. De la plus ancienne à la plus jeune : Philomène (née en 1843), Victoria (1846), Henriette (1851), Délienne (1863), Virginie (1853), Marie Louise (1855), Celina (1833), Delienne (1863), Julie (1864) et Alphonsine (1867). Et ils avaient aussin trois fils, Janvier (né en 1848), Télesphore (1860) et Joseph (1871).

En plus des familles des filles Philomène, Henriette et Victoria Lamontagne dont leurs familles sur le chemin du 6ème rang sont déjà décrites ci-dessus, la fille Julie s'est également installée au 6ème rang ou à proximité avec son mari, Narcisse Girard, et leurs trois enfants; un autre enfant est mort à la naissance. Janvier, le fils aîné de Simon, a également établi une ferme sur la route du 6ème rang où sa femme Marguerite Pelletier et lui avaient 14 enfants après leur mariage en 1871. Il semble que les autres fils et filles de Simon et Marie Legendre aient vécu ailleurs après leur mariage.

Parmi les autres Lamontagne installés sur le chemin du 6ème rang comprend l’un des frères plus jeunes de Simon, François, né vers 1820, et son épouse Émerance Delage dit Larivière, qui avaient cinq enfants à la maison en 1871. Et Simon avait deux neveux, les fils de son frère Isaïe: David Lamontagne et sa femme, Marie Bergeron, mariée en 1861, avait trois enfants vivant dans leur ferme en 1871, et Ferdinand Lamontagne et sa femme, Aurélie Tardif, mariée en 1831, avaient un enfant chez eux en 1871.


Ce portrait de Simon Lamontagne, un cousin germain d'Euphrosine Lamontagne Demers, la mère de Delvina, et de certains de ses enfants fut probablement pris dans les années 1880 après la mort de son épouse, Marie-Madeleine Legendre, en 1881. Debout : Alphonsine (née en 1867), Joseph (1871), et Délienne (1863). Assise : Philomène (née en 1843), Simon Lamontagne (1818), et Victoria Lamontagne (1846). Ses enfants ne sont pas illustrés : Henriette (née en 1851), Janvier (1848), Virginie (1853), Télesphore (1860), et Julie (1864).


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Ainsi donc, bien que la famille proche de Delvina ait défriché une terre d’une forêt vierge à partir de 1859, la famille n’a jamais été vraiment seule. Au moment où Delvina était suffisamment âgée pour prendre conscience de son environnement, elle a vécu une vie entourée de frères et sœurs, de cousins et de beaux-parents actuels et futurs. Dans les recensements de 1871 et de 1881, environ 70 membres de la famille vivaient à moins d’un mille de chez elle. Toutes ces relations, presque toutes de sa génération ou plus jeunes, auraient considéré son père et sa mère comme le patriarche et la matriarche de la famille élargie. Ce respect aurait été créé en partie parce que son père était le plus âgé et le seul Demers de sa génération aux paroisses de Saint-Julien et Saint-Fortunat et que sa mère n'y représentait qu’un de trois Lamontagnes de sa génération (les autres étant les cousins Simon et François). Simon Lamontagne, l'aîné des Lamontagne de la ville, et son épouse Marie-Madeleine Legendre, auraient joué un rôle semblable à la famille Lamontagne.

Delvina a donc grandi chez une des familles la plus respectées et ses parents ont probablement été appelés oncle et tante, ou ont reçu le titre honorifique de père et de mère même d’autres non apparentés dans la paroisse. Et avec le temps, Delvina aurait été à son tour la tante de nombreux neveux et nièces qui vivaient le long de la route, dont beaucoup, notamment les enfants de Télesphore et d’Henriette, l’auraient probablement considérée comme une seconde mère.

Il n’y a pas beaucoup de documentation sur la vie quotidienne de Delvina avant son mariage à 30 ans en 1888. Mais, ayant grandi sur une ferme familiale de subsistance, elle aurait dû accomplir des tâches ménagères comme toutes les jeunes filles et femmes jusqu'à son mariage quand elle a quitté la maison où elle avait vécu presque toute sa vie. Il y aurait eu des tâches non directement liées à l'agriculture : cuisiner, nettoyer, faire la vaisselle et lavage, apporter l'eau du puits à la maison, entretien des feux de là poêle pour la cuisine et chauffage, et confection et réparation des vêtements. Et puis, il y avait des activités liées à sa vie dans la ferme: semer, sarcler et récolter les légumes du potager, conserver le sirop d'érable, cueillir et conserver de baies sauvages, donner à manger aux poules, cueillir des œufs, amener les vaches laitières des champs à l'étable pour la traite, filature de la laine, et, comme Delvina est devenue plus âgée et plus forte, aider dans les champs pendant la récolte des foins et moissons.

Parce qu’elle était la plus jeune enfant de sa famille, elle n'aurait pas aidé sa mère avec le soin d'aucun de ses propres frères et sœurs alors qu'elle grandissait. Mais après que son frère Télesphore ait épousé Henriette en 1869 et qu’il ait continué à vivre sur la ferme familiale, Delvina et sa mère collaboreront aux travaux de la maison et aux soins de la famille grandissante. Ce qui permettra à Henriette, qui était bonne couturière, d’en faire plus beaucoup. Et quand sa mère est devenue plus âgée, Delvina avait la responsabilité première de prendre soin de sa mère jusqu’à son mariage en 1888 quand Delvina est partie de la ferme familiale et Saint-Fortunat pour plusieurs années.


Jusqu'à son mariage à 30 ans, Delvina vivait dans la maison de ses parents. Après le mariage de son frère Télesphore avec Henriette Lamontagne en 1869, le jeune couple et leurs enfants vivaient également à la ferme, et après la mort de son père en 1871, Télesphore est devenu la propriétaire de la ferme où sa famille grandissante continuait à vivre jusqu'à leur émigration au Maine en 1890. Delvina donc jouait un rôle important, de même que sa mère, décédée au début de 1890, dans les vies des enfants chez Télésphore et Henriette.


Cette photo fut prise vers le temps du mariage de Delvina. En plus d'Henriette et Télesphore, cette photo de la famille montre tous leurs enfants survivants. Assis dans la première rangée : Éva (née à Saint-Fortunat en 1879) ; Henriette (née à Saint-Ferdinand-d'Halifax en 1851) ; Phidelem (né à Saint-Fortunat en 1887) ; Donat (né à Saint-Fortunat en 1885) ; Télesphore (né à Saint-Gilles/Saint-Agapit en 1847) ; et Émile (né à Saint-Fortunat en 1877). Debout dans la deuxième rangée : Lydia (née à Saint-Fortunat en 1873) ; Andreana (née à Saint-Fortunat en 1881) ; Odelie (née à Saint-Julien/Saint-Fortunat en 1871) ; Virginie (née à Saint-Fortunat en 1875) ; et Télesphore, fils (né à Saint-Julien/Saint-Fortunat en 1869). Quand la photo fut prise, un des enfants, Melanie, était déjà décédée. Elle est née en 1884 et décédée en 1888.
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Au-delà de la famille et d’une égale importance, le monde de Delvina était imprégné des croyances, des prières et des offices de l’Église catholique, à commencer par son propre baptême deux jours après sa naissance. Dans son enfance, elle apprenait les prières de sa famille, en particulier aux genoux de sa mère. Delvina les a récités en privé ou avec d’autres au réveille au matin, avant de manger les repas et avant de dormir. La famille récitait ensemble le chapelet presque tous les soirs après le souper, mais surtout pendant les 40 jours du carême.

Au fil de ses 15 premières années, aller à «l'église» signifiait pour Delvina la chapelle de Saint-Julien environ quatre milles de chez elle, soit un trajet en voiture à cheval d'environ une heure et demie. Établie seulement en 1858 comme mission de la paroisse de Saint-Ferdinand-d'Halifax, aux premières années la chapelle n'était desservie que toutes les deux semaines par un prêtre missionnaire qui disait la messe et donnait la communion, baptisait les nouveau-nés, prenait des confessions et présidait les funérailles. En 1863, la chapelle eut son premier prêtre résident, le curé Pelisson, qui servait non seulement à ceux qui vivaient à Wolfestown, mais également à ceux d’Ham-Nord et de Coleraine.

Les dimanches pendant les premières années où le prêtre missionnaire ne se rendait pas à Saint-Julien ou les fréquents dimanches lorsque le temps ou les routes rendaient la tâche trop difficile pour se rendre à Saint-Julien, la famille restait à la maison pour prier au lieu d'assister à la messe.

Mais les jours où le beau temps ou l'état des chemins permettaient les paroissiens se rendaient à la chapelle, les familles situées aux loin coins de la paroisse, comme celles du 8ème rang et de l'extrémité du 6ème rang, y compris celle de Delvina, étaient les premières qui commencent la longue promenade. La messe aurait été organisée tôt, peut-être à huit heures, afin de réduire le temps de jeûne avant la communion, mais suffisamment tard pour permettre aux personnes des rangs les plus éloignés qui avaient besoin environ d'une heure et demie, ou même deux heures, pour se rendre à la chapelle.

Dans leurs voitures ou traîneaux tirés par des chevaux, accompagnés d'enfants et de jeunes adultes aux pieds si les routes étaient sèches (Delvina dira plus tard à ses petits-enfants que, pour économiser des souliers, elle marcherait pieds-nus jusqu'à la colline escarpée au bas de laquelle elle était permette de porter ses chaussures avant d’arriver à la chapelle), les familles les plus éloignées seraient rejointes par des familles plus proches de la chapelle ou par celles descendant des 7ème et 8ème rangs qui les rejoindraient au croisement de la route du 6ème rang avec la chemin du 6ème rang. Plus près de la chapelle, d'autres wagons ont rejoint la ligne à l'intersection avec la route 4ème rang, puis plus tard sur la route de Gosford.

Au début des années 1870, les cent familles ou plus qui vivaient dans les rangs les plus éloignés formaient une longue file à l'approche de la chapelle. Surtout quand le temps le permettait, les enfants et les jeunes adultes se seraient fréquentés en chemin, partageant des nouvelles et les transmettant aux adultes restant dans les chars. Le voyage aurait été un bon moyen, pour les hommes et les femmes en âge de se marier, de se familiariser de manière informelle avec les futurs époux potentiels.

En arrivant à l'église, les paroissiens auraient été encore plus nombreux, avec les familles des 1ème, 2èm et 3èm rangs et du chemin de Gosford rejoignant celles des rangs plus éloignés. Un total d'un millier pourrait se rendre à la messe de Saint-Julien par 1870. Avant le début de la messe et après, les conversations et réunions plus informelles avaient lieu sur les marches de l'église et dans la cour où les wagons étaient attachés à des clôtures, poteaux, et chicots. La messe, d'une heure environ, serait suivie de baptêmes, mariages et confessions.

À 10 ans, Delvina aurait célébré sa première communion. Pour cela, elle et d'autres de son âge ont reçu des instructions religieuses du prêtre de la chapelle, mais l'instruction aurait été limitée en raison du peu de temps disponible pour le prêtre missionnaire. Il semble probable que la plus grande partie de son enseignement religieux en dehors de la masse elle-même aurait été reçue de sa mère et d'autres femmes de la famille. Plus tard, vers 14 ans, elle aurait été confirmée. Encore une fois, le curé et les membres de la famille auraient donné des instructions supplémentaires pour sa confirmation.

Jusqu'à la construction de l'église à Saint-Fortunat, les mariages auraient été célébrés à la chapelle de Saint-Julien. Lors de ces joyeuses occasions, comme le mariage de son frère Télesphore avec Henriette en janvier 1869, le voyage jusqu’à la chapelle aurait été particulièrement festif, avec des traîneaux décorés de branches de sapin, de chants et de rires en chemin.

Mais il est arrivé beaucoup que le voyage à la chapelle se faisait dans une profonde douleur à cause des funérailles de ceux qui mouraient si souvent de maladies, d'accidents et d'accouchements. Pour la jeune Delvina, il y avait deux funérailles particulièrement pénibles. En 1865, son plus jeune frère, Octave-Alexis, seul trois années plus âgé d’elle, est décédé à sept ans. On ne savait pas les circonstances de sa mort, mais il a été enterré dans le cimetière situé près de la chapelle de Saint-Julien. Puis, six ans plus tard, quand Delvina à l’âge de 12 ans, son père, 59 ans, est décédé en 1871 d’un accident de ferme et était enterré à Saint-Julien le lendemain. Avant les funérailles, les corps auraient été exposés dans la meilleure salle de la maison, en présence de membres de la famille et d’amis qui récitaient un chapelet toutes les heures, même la nuit. Le jour des funérailles, quelle occasion solennelle devait être le long trajet jusqu’à la chapelle: pas de conversation, pas de rire, les cercueils du fils ou du patriarche de la famille placés dans une voiture de ferme et suivie des nombreux membres de la famille et des voisins.

À la fin de 1871, la paroisse de St-Fortunat est établie, mais un prêtre résident n'est nommé qu'à 1873, la même année que l'église est construite. Cependant, à partir de l'été 1871, un prêtre de Saint-Ferdinand, le père Francœur, donnait des messes à la maison de Damase St-Pierre, sur le chemin du 7ème rang dans le village. On peut supposer que des confessions et des baptêmes y auraient également été offerts.

Combien la vie a dû être plus facile après la construction de la nouvelle église dans le village en 1873. Désormais, c’est la moitié du temps pour la famille Demers se rendre à l'église (il lui restait encore environ 45 minutes pour y se rendre les deux milles de chez eux), et avec un prêtre résident, des messes, basses et grandes messes chantées, étaient organisées tous les dimanches matin, baptêmes et mariages pouvaient être offerts pendant la semaine, et des cours de catéchisme étaient disponibles après les messes. Et avec la cloche de l’église installée à 1876, Delvina pouvait même maintenant entendre les appels à la prière et à la messe lorsqu’elle travaillait à la maison, dans le potager, la basse-cour, ou les champs.

Avec la nouvelle église de Saint-Fortunat et la croissance continuelle de la municipalité, le village a pris l'aspect d'un village typique établi de Québec, avec un presbytère pour le prêtre, des magasins généraux, un bureau de poste et un forgeron. Et comme dans tous les plus vieux villages du Québec à cette époque, le dimanche à Saint-Fortunat était devenu le jour non seulement pour assister à la messe, mais aussi pour aller faire des affaires avec des individus, dans les magasins du village, ou chez le forgeron, ou pour socialiser à un rythme plus lent sur le perron de l'église, de la poste ou des maisons à proximité.

Les parents de Délvina ont valu apparemment l'éducation de leurs enfants ; tous leurs fils en 1871 peut lire et écrire et on sait qu'à moins un des eux, Télesphore, assistait une école du rang à Saint-Gilles. Étant donné que Delvina pourrait lire et écrire comme adulte, elle a assisté probablement une école du rang sur le chemin de 6ème rang quand elle avait cinq ou six ans et pour plusieurs années par la suite. On ne connaît pas exactement les dates d'établissements des premières écoles, mais dans son histoire de Saint-Fortunat, le curé Vaillaincourt écrit que les premières étaient là au commencement de la colonisation, c’est-à-dire dans les années 1850s. Comme le chemin du 6ème rang était une des premières routes y établit, il semble plus probable qu'il y avait une école du rang sur ce chemin quand Delvina a grandi assez pour y assister. Typiquement, l'école aurait eu deux étages avec un logement pour l'enseignante au deuxième étage et une pièce unique au premier étage avec un poêle à bois « de deux ponts » qui aurait chauffé la classe et servi de cuisinière.


Delvina aurait commencé l’année scolaire à l’automne et l’aurait suivie jusqu’au printemps avec des pauses pour les vacances. Parce que l’assistance à l’école n’a pas obligatoire, pendant la saison des récoltes, du sirop d’érable et des semailles beaucoup d’élèves, sinon tous, n’attendent pas pour aider à la ferme. Son institutrice aurait été une jeune femme célibataire de quelques années seulement plus âgée que ses plus âgées élèves et dont sa propre éducation aurait été limitée à une école de rang. (Par exemple, en 1888, une de ses nièces, Odelie Demers, serait enseignante à l’âge de 16 ans seulement et après n’avoir assisté que l’école du chemin du 6ème rang). En général, ses classes auraient eu plus de 20 garçons et filles de tous âges et de tous niveaux d’éducation (de la première à la onzième années). Avec les autres, Delvina aurait appris à lire et à écrire, faire des mathématiques, étudier la géographie et à l’histoire, et tout au long de l’enseignement, commençant par une prière du matin, les principes de la religion catholique auraient été renforcés, sinon enseigne.

Malgré le traumatisme qui suit la mort de son père dans l'été de 1871, sa mère s’a assuré que la vie de Delvina, et la sienne aussi, reste stable et en sécurité pendant la longue période que Delvina est célibataire. Seules quelques semaines après la mort, sa mère a transféré la ferme familiale à son fils Télesphore qui y a habité depuis son mariage à Henriette en 1869. La donation de terre, qui était entièrement la propriété d’Euphrosine après la mort de son mari, n’était pas une simple affaire. Plutôt, c’était une donation avec plusieurs restrictions sur l'usage de la terre par Télesphore et obligations financières envers ses frères, sœurs et sa mère (qui, parmi d’autres choses, a retenu la droite d’habiter au foyer pour le reste de sa vie et qui doit se mettre en accord avant que la terre pourrait être vendue).

Dans le cas de Delvina, la donation de terre a prévu que Télesphore « s’y oblige d’avoir bon soin de Delvina, sa soeur, jusqu'à ce qu’elle ait atteint l’âge de dix-huits ans, de la nourrir à sa propre table et, comme lui-même, de la vêtir, blanchir, et raccommoder et, enfin, d’avoir soin de ladite Delvina comme un frère chrétien et charitable ferait pour sa sœur, et de plus de donner à cette enfant quand elle laissera la maison du donataire un petit ménage comme il est d’habitude dans la campagne. » En somme, comme cela s'étaient fait avant la mort de son père, Delvina pourrait vivre dans la ferme avec sa mère et la famille de son frère jusqu'à elle aurais été prête de partir.

Bien que ni en la donation de terre ni légalement, Delvina ait eu, en sa tour et comme toujours, ses propres obligations d’aider au foyer et à la ferme après la mort de son père. Devant les mœurs de l’époque et du lieu, il aurait été impensable pour elle de faire le contraire. Donc, comme jeune fille au foyer de son frère, elle continuait de travailler dans le potager, traire les vaches, faire le ménage, cuisiner, et même aider au temps des foins et moissons. Et comme jeune adulte, elle aurait aussi fourni un soutien moral et pratique à Henriette et aux autres femmes du voisinage des nombreuses naissances, maladies et accidents qui ont souvent entraîné la mort de nombreux bébés, enfants et adultes.

Delvina était déjà l’âge du mariage depuis deux années quand elle a rencontré Joseph Bourassa en 1876, mais on ne savait pas si elle n’avait courtisé aucun autre par ce temps ou avant de se courtiser tous les deux. Et on ne savait pas aussi quand les deux ont commencé de faire la cour. La cour, était-elle dans une courte durée des mois ou une longueur des années ? Ayant les personalities apparemment méthodiques et délibératives, on suspect qu’ils avaient fait la cour pendant des nombreuses années pour se donner le temps de ramasser les ressources pour élever une famille.

Faire la cour pendant ce temps-là était une affaire simple, commençant avec l’homme de rendre visite chez la femme au cours de l’après-midi ou en soirée le dimanche avec au moins un membre de sa famille là tout le temps. Un couple s'accompagnait aussi dans le veillées et des fêtes. Le père de la femme aurait dû approuver la cour et le mariage ; dans le cas de Delvina, c’est probablement que Joseph ait demandé de sa mère veuve la permission de faire la cour et la marier.

En se promenant à pied ou dans une voiture à cheval à Saint-Julien ou Saint-Fortunat au cours des années 1870 et 1880, Delvina aurait été témoin de nombreuses améliorations aux fermes le long du chemin et à la route elle-même: des maisons agrandies ou remplacées entièrement; des granges, hangars, étables, et clôtures construites; plus de terres défrichées et des souches et roches enlevés pour aplanir les champs. Et les routes se redressaient et s'élargissaient : des zones basses remplies, des fossés creusés, de petits ponts améliorés. Et avec l’arrivée de nouvelles familles et la naissance de tant d’enfants, la population augmentait.


Mais à partir du milieu des années 1870, les familles ont commencé à quitter Saint-Fortunat pour se rendre aux États-Unis ou ailleurs au Canada, d'abord par ruissellement, puis bientôt par inondation. Dans la famille de Delvina, le premier à partir fut son frère Louis Ferdinand qui quitte Québec avec sa famille pour le Nebraska in 1875. Prochain, son frère Damase et son épouse Rebecca, ainsi que leur famille de six enfants, lorsqu'ils partirent en 1879 pour le Minnesota. [L’histoire orale de la famille dit qu’ils sont partis parce que Damase était affolé par le décès accidentel de son deuxième fils, Joseph-Théodore, 12 ans, en 1878 alors qu’ils construisaient une grange et qu’une poutre frappait la tête du garçon, le tuant sur le coup.] Un peu près au même temps, la sœur de Delvina, Marie Euphrasie, son mari, Hilaire Aubin, et six de leurs enfants déménagent à Lewiston pour y travailler au manufactures. En 1882, le cousin Évangéliste Demers, sa femme et ses sept enfants suivent les Aubins à Lewiston. En 1884, Théodore, le frère aîné de Delvina, et son épouse Philomène et leurs neuf enfants s'installent également à Lewiston. Et à la fin des années 1880, le cousin Honoré Demers et son épouse Victoria et leurs neuf enfants déménagent à Sanford, dans le Maine.

Au moment du mariage de Delvina, c’est seulement sa mère et son frère Télesphore et sa famille qui étaient les membres de la famille proche à rester sur le chemin du 6ème rang, et il semble que la raison principale pour laquelle Télesphore n’ait pas déménagé était due à ses obligations envers sa mère, ses obligations morales et ses obligations légales sous la donation de terre, et l’opposition probable de sa mère à quitter la ferme familiale. (Télesphore et sa famille émigreront à Sanford, dans le Maine, quelques mois après le décès de sa mère en 1890.)

Toute cela a dû être déchirant pour Delvina, de dire au revoir à toutes ces familles. Mais Delvina et sa mère pourraient effectuer plusieurs voyages aux États-Unis à Lewiston dans la première moitié des années 1880 pour rendre visite aux familles d’Hilaire et Marie Euphrasie Aubin et Théodore et Philomène Demers. Nous connaissons ces visites uniquement à travers les photos ci-dessous qui y ont été prises dans un studio photographique.

Il est fort probable qu'elles auraient pris le Québec Central Railroad de Disrael à Lewiston, plutôt que le Grand Tronc d'Arthabaska. (Une connexion routière commode entre Arthabaska et Saint-Fortunat n'a été établie qu'après 1888.) On peut facilement imaginer l'excitation de quitter le calme du chemin du 6ème pour faire une excursion de train de nuit vers la ville animée de Lewiston en « les États. » Bien que nous n'en soyons pas certains, les robes portées par les deux sur les photos ci-dessous ont probablement été confectionnées par Henriette ou, au moins, avec son aide. Nous ne savons pas non plus si les voyages visaient simplement à rendre visite à de la famille à Lewiston, ou encore à permettre à Delvina de rencontrer des hommes célibataires ou de voir si Delvina ou sa mère souhaiteraient s'y installer. Si pour ces derniers objectifs, rien ne viendrait d'eux. Delvina revient à Saint-Fortunat à toutes les occasions (et finit par courtiser et épouser Joseph Bourassa), de même que sa mère qui était probablement toujours heureuse de revenir chez elle et y habitait jusqu'à sa mort.

Delvina Demers, probablement à
Lewiston, Maine, vers 1880.

Ceci semble être la plus ancienne photo de Delvina. Elle a peut-être été prise vers 1880, alors qu'elle a 22 ans et vive toujours sur la terre familiale à Saint-Fortunat avec sa mère et la jeune famille de son frère Télesphore et de sa belle-sœur Henriette sur le chemin du 6ème rang. Cette photo et la photo de sa mère ci-dessous étaient probablement prises lors d'une visite à sa sœur, Marie Euphrasie Demers et beau-frère Hilaire Aubin, qui avaient déménagé à Lewiston, dans le Maine, à la fin des années 1870.
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Euphrosine, la mère de Delvina, est devenue veuve en 1871 à la mort de son mari Damase, âgé de 59 ans à la suite d’un accident sur sa terre. C’est la première photo que nous avons d’elle, sur trois seulement. Sa fille aînée, Marie Euphrasie Demers Aubin, a été la première de ses enfants à émigrer (dans son cas seulement pendant plusieurs années) aux États-Unis. Tous ses fils survivants jusqu’à l’âge adultes, Théodore, Télesphore, Damase et Louis-Ferdinand, finiront par émigrer définitivement aux États-Unis ou l'oest du Canada. Euphrosine est décédée en 1890 sur la ferme familiale qu'elle a sculptée dans la forêt à Saint-Fortunat en 1859 avec son mari.
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Il semblerait que cette photo ait été prise lorsque Delvina a effectué une autre visite à Lewiston, cette fois-ci pour voir la famille de son frère et de sa belle-sœur, Théodore et Philomène Lamontagne Demers, qui s’y étaient installés en 1884, ainsi que la famille Aubin qui y avait déménagé plus tôt. On la voit ici avec sa cousine Philomène Demers, la fille aînée de Théodore et Philomène qui mourut en 1886 à l'âge de 22 ans.
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Delvina Demers, vers 1886. Probablement prise à Lewiston, Maine.

Cela semble être un portrait qui a également été pris à Lewiston lors d’une visite à la famille de son frère, Théodore Demers, et sa femme Philomène. La photo a été prise peu de temps avant son mariage en 1888.
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La vie de Joseph avant son mariage

Comme beaucoup d’autres colons de Saint-Fortunat, la famille Bourassa venait d'une des vieilles seigneuries de la rive sud du fleuve Saint-Laurent, où Joseph était né en 1860 sur le Chemin Vire-Crêpes à la paroisse de Saint-Nicolas. Sa mère, Rose Olivier, y était née en 1827. La grande famille Olivier avait des liens avec Saint-Nicolas depuis les années 1660. Georges Bourassa, né 1831 à la paroisse voisine de Saint-Joseph-de-Lauzon, avait des racines avec cette paroisse aussi pour des générations. Rose et Georges s'étaient mariés à Saint-Nicolas en 1855 et s’installaient au lot numéro 407 sur le chemin Vire-Crêpes où ils auraient huit enfants : Marie-Rose (1856), Louis-Michel (1858), Louis-Joseph (1860), Georges-Edouard (1861), Marie-Anne (1862), François-Benjamin (1864), Georges-Edouard (1865), et Felix-Edouard (1860).

Âgé seulement de 42 ans en 1873, Georges Bourassa est décédé, laissant sa femme de 46 ans avec sept enfants mineurs (leur fille Marie-Rose est morte en 1868), y compris leur deuxième fils Joseph, âgé de 12 ans. Après la mort de son mari, Rose et ses enfants continuent à vivre pour quelques années à la ferme sur le chemin Vire-Crêpes. Jusqu’à l'âge de 14 ans, Joseph assiste à une école de rang, probablement dans le chemin Vire-Crêpes. Ses études sont de seulement quatre années en totale. Il travaille sur la ferme avec sa mère et ses frères et sœur, et après la mort de son père, il accompagne sa mère à vendre les produits de la ferme au marché à la basse ville de Québec de l'autre côté du fleuve Saint-Laurent environ dix milles de Saint-Nicolas.

En 1876, toujours non marié, Rose a pris une grande décision - de vendre la ferme à Saint-Nicolas et s’installer à Saint-Fortunat, avec la pensée qu'elle pourrait mieux établir ses fils comme cultivateurs dans les terres moins chères et plus disponibles là-bas. Cette année, les rôles d'évaluation de la municipalité de Saint-Fortunat montrent que Rose avait deux lopins de terre dans le 7ème rang, sur les lots adjacents des numéros 5 et 6 de 100 et 40 acres respectivement.

Quand elle a décidé à déménager Saint-Nicolas, pourquoi a-t-elle choisie aller à Saint-Fortunat et pas une autre paroisse dans les Cantons de l’Est ? Comme beaucoup d’autres qui s'étaient installés à Saint-Fortunat, il est possible qu’elle suive enlever dans les pas d’autres de la famille ou des amis de Saint-Nicolas ; avec l'entraide commune de cette période, le déménagement pourrait être plus facile avec eux. Dans le cas d’une veuve de 46 ans avec sept enfants, enlever d’être entourée des amis et membres de la famille auraient été un besoin même plus impérieux.

Mais Rose, avait-elle des membres de la famille déjà à Saint-Fortunat ? Deux signataires nommés Olivier, Benjamin and Joseph, sont dans la pétition de 1871 à l'archevêque de Québec qui a demandé l'établissement de la paroisse qui devenait plus tard Saint-Fortunat. (Il n'y a pas un Bourassa dans la pétition.) Benjamin et Joseph Olivier sont aussi inscrits dans les recensements de 1861 et 1871 pour Wolfestown (plus tard Saint-Fortunat), et dans le census de 1881 sont Joseph and Alvina Olivier dans un ménage, et une Christine Olivier et un Benjamin Demers dans un autre. (Il n'y a pas aucun Bourassa dans les recensements de 1861 et 1871, et Rose et sa famille en sont les seules Bourassa en 1881.) Les Oliviers dans la pétition et les recensements, sont-ils de la parenté de Rose qui pourrait avoir de l'influence sur elle et sa décision de s'installer à Saint-Fortunat ?

De Christine Olivier (née 1804), elle est une tante de Rose et une sœur de Sylvestre Olivier (1801-1878), qui est le père de Rose. Sylvestre et Christine étaient les enfants de François Olivier et Marie-Rose Demers, tous les deux de Saint-Nicolas où tous leurs enfants étaient nés et élevés. (Marie-Rose Demers et Damase Demers, le père de Delvina étaient cousins enlever issus de germain.) Christine a marié Modest-Basile Demers, aussi de Saint-Nicolas, et ils avaient un fils, Louis-Benjamin Demers, qui est devenu un prêtre et, comme le destin l’aurait voulu, le deuxième curé à Saint-Fortunat.  

On ne sait pas quand Christine Olivier Demers a aménagé à Saint-Fortunat, mais c’est probable qu’elle aurait accompagné son fils quand il arrive à Saint-Fortunat comme curé en 1879. (À ce temps Christine était veuve depuis quelques années.) Parce que Rose Olivier Bourassa y était arrivé trois ans plus tôt en 1876, c'est peu probable que Christine Olivier Demers ou son fils Benjamin Demers aient une influence sur Rose et sa décision de s'installer à Saint-Fortunat.

Les autres Oliviers, Benjamin et Joseph (père et fils, respectivement) avaient habité à Wolfestown depuis 1861. Benjamin était le mari de Desanges Dussault et le fils de Procul Olivier, qui, à son tour, était un frère de Sylvestre Olivier (le père de Rose) et de Christine Olivier Demers. Dans une autre manière de le dire, Benjamin était un cousin germain de Rose Olivier Bourassa, et Joseph Olivier était un autre cousin d’une génération de plus. Donc, c’est fort probable que c’était à cause principalement de Benjamin et Joseph que Rose a décidé de s’établir sa famille à Saint-Fortunat.

Mais il y d'autres d’origine de Saint-Nicolas qui auraient pu jouer un rôle dans sa décision, particulièrement Hilaire Aubin et son frère, Barthélémi, et leurs demi-frères, Honoré et Évangéliste Demers, tous ceux qui avaient grandi sur le chemin Vire-Crêpes à la ferme de leur beau-père et père Germain Demers.  De la même génération que les frères Aubin et Demers, c’est très probable que Rose les aurait tous sus quand elle était jeune et habitait sur le chemin Vire-Crêpes. En 1876, tous les quatre frères avaient maintenant des fermes sur le chemin du 6ème rang, comme à enlever avaient de leurs cousins Demers, Théodore, Télesphore et Damase, fils, d'orgine de Saint-Gilles, près de Saint-Nicolas. En aménageant à Saint-Fortunat, Rose aurait donc été entourée et soutenue par de nombreux membres de sa famille et de vieux voisins de Saint-Nicolas et Saint-Gilles.

En 1876, les fermes Bourassa des rangs 7, lots 5 et 6, et la ferme familiale de Delvina des rangs 6, lots 4, 5 et 6 se rejoignaient, la petite rivière Bulstrode les séparant grossièrement. La carte montre leurs sites approximatifs. Source : Google Map Data, copyright 2019. Les deux fermes n'auraient été distantes que d'environ un kilomètre l'une de l'autre par la route le long du chemin du 6ème rang, de la route de la Grande Ligne et du chemin des Pointes. Le recensement de 1881 à Saint-Fortunat, dans lequel le recenseur allait successivement de ferme en ferme, donne une bonne indication de la proximité des fermes Bourassa et Demers; il semble que seulement deux autres fermes soient situées entre les fermes enlever de Demers et de Bourassa le long des trois routes.

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Joseph Bourassa, fils de Rose Olivier et de Georges Bourassa, dans une photo qui semble avoir été prise avant son mariage avec Delvina Demers en 1888, peut-être vers 1884 lorsque sa mère lui a transféré une terre au lot numéro 13 du 7ème rang au sud du centre du village de Saint-Fortunat. Nous ne savons pas où la photo a été prise, mais c'est probablement dans la province de Québec. Sa fille Angelina l'a décrit plus tard comme un homme avec un « fort physique, aux cheveux blonds, frisés, au clair, présentait des qualités morales. . » Au cours des années précédentes de son mariage, il travaillait dans des fermes de plusieurs villes dans les Cantons de l'Est, apparemment pour gagner de l’argent pour s’établir sur sa propre ferme.
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Alors, Delvina et Joseph, quand se sont-ils rencontrés pour la première fois? Peut-être l'a-t-elle vu pour la première fois de loin quand sa mère, la veuve Rose Olivier Bourassa, et ses cinq frères et sa seule sœur avaient emprunté le chemin du 6ème rang pour passer devant la ferme Demers et se diriger vers la nouvelle ferme Bourassa située au 7ème rang . Ou plus vraisemblablement, ils se sont rencontrés après la messe le dimanche suivant, lorsque la famille Bourassa a rejoint d'autres familles sur les marches de l'église du village. On imagine Joseph, plus jeune de deux ans, timide et calme, n'échangeant pas un seul mot avec Delvina car sa famille était entourée d'une foule turbulente de nouveaux membres de la famille et de voisins. Delvina l'a-t-il même remarqué? Ou était-elle peut-être plus intéressée à parler à sa mère et à sa sœur?

En tant que voisins, Joseph et Delvina se seraient souvent vus au fils des mois et d'années et auraient au moins eu l'occasion de se rencontrer à la messe et à d'autres activités de l'église chaque dimanche et lors des nombreux jours saints. On ne sait pas quand ils ont commencé à faire la cour, mais cela prendrait 12 ans après leur première rencontre avant leur mariage en 1888. Tout au long de cette période, Delvina a continué à vivre avec sa mère et son frère Télesphore et sa famille à la ferme de Demers. Avant son mariage, Joseph travaillait dans plusieurs fermes dans les Cantons de l'Est, notamment à Colebrooke, Ayers Cliff, Eaton Corner et Barston, dans le but de gagner de l'argent pour s'établir sur sa propre ferme. Cela aurait été en plus d'aider sur la ferme de sa mère.

En 1884, Joseph acquit pour la première fois sa propre terre agricole lorsque sa mère lui a cédé enlever de la terre qu'elle avait acquise en 1881 de son cousin germain, Louis-Benjamin Demers, curé de la paroisse. Ce terrain, situé sur le 13ème lot du 7ème rang, à environ un kilomètre au sud du centre du village, deviendra plus tard la ferme où lui et Delvina s'installeront et élèveront leurs enfants.

Dans la cession de terrain, datée du 21 novembre 1884, le terrain est décrit comme suit: «une terre située au nord-ouest de la moitié sud-est du lot de terre numéro septième rang du dit canton de Wolfestown, contenant deux arpents de front sur la profondeur du lot, moins trois arpents de la réserve, à prendre, le cordon entre le septième et le huitième rang, bornée, la terre sur un cordon entre le six et le septième rang et à l'autre à trois arpents du cordon du huitième rang, circonstances et dépendances. » L'acte ne décrit aucun bâtiment sur le terrain. Ses actifs à cette époque totalisaient plusieurs vaches, un cochon, des poulets et une érablière de 500 érables.

En plus de l'agriculture, Joseph était un chanteur accompli de musique d'église et jouait un rôle actif en tant que chanteur et enseignant dans trois paroisses. Lorsque les Bourassa sont arrivés à Saint-Fortunat en 1876, l’église de Saint-Fortunat n’avait que trois ans. Avant son mariage et peut-être même après, Joseph chantait la messe à Saint-Julien-de-Wolfestown et à Saint-Fortunat. Lorsque la paroisse de Saint-Jacques-de-Majeur, située également dans les limites de l'ancien canton de Wolfestown, a été créée au sud-est de Saint-Fortunat en 1910, il y enseignait également la musique d'église.
À venir : La vie conjugale de Delvina et Joseph

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