A family history blog in French and English

Sanford-Springvale, Maine, Railroad Station, early 1900s. Collections of the Sanford-Springvale Historical Society.

Saturday, January 15, 2022

La famille Demers du chemin du 6e rang

Note d'introduction :

En 2021, la petite ville agricole de Saint-Fortunat, Québec (population actuelle 277), a fêté le 150e anniversaire de l'établissement fondé en décembre 1871 de la paroisse de Saint-Fortunat-de-Wolfestown. La même région est devenue une municipalité au même nom deux ans plus tard.

Charles Bédard, un résident de St-Fortunat, m'a contacté par courriel à l'été 2020 après avoir lu ce blog tout en faisant des recherches en ligne sur l'histoire de la paroisse et de la ville. Charles a été membre du Comité des fêtes du 150e de St-Fortunat qui était chargé de développer des activités pour célébrer l’anniversaire et du Comité du livre qui était responsable de produire un album commémoratif. À la suite de notre correspondance, quelques parties du contenu du blogue sont intégrées à l'album intitulé, St-Fortunat 1871-2021 : 150 ans d'histoire à se raconter (pub. juin 2021). De plus, Charles m'a invité à écrire deux articles pour la partie du livre sur quelques-unes des familles pionnières de Wolfestown : un sur la famille de Damase Demers et Euphrasie Lamontagne qui s'y sont installés en 1859, et un sur la famille de Simon Lamontagne et Marie Madeleine Legendre, qui y arrivée plus tôt, vers 1845.

C'était pour moi très satisfaisant et significatif de participer ainsi à la célébration de l'établissement de Saint-Fortunat, même si à distance en cette période de fermeture des frontières entre le deux pays à cause de la pandémie. Je tiens à remercier chaleureusement Charles de m'avoir fait participer à la célébration.

L’album est, bien sûr, entièrement en français, mais j'ai également posté ici une traduction anglaise dans le blog. Bientôt, je posterai les versions française et anglaise de l'article de la famille Lamontagne. 

Comme pour la plupart des articles du blog, j'ai reçu l'aide de plusieurs cousines en écrivant des articles dans l’album. Anita Demers Olko de Lewiston, Maine, m'a aidé avec des informations généalogiques et de vieilles photographies. De plus, j'ai reçu l'aide de nos cousines Jeanne d'Arc et Cécile Leblanc, qui vivent maintenant à Victoriaville, Québec, mais qui sont nées et ont grandi sur une ferme à Saint-Fortunat dans les années 1930, 1940 et du plus. Depuis plus de cinq ans, Jeanne d'Arc et Cécile m'ont fait partager leur connaissance de l'histoire familiale et de l'histoire de la ville et de la paroisse de Saint-Fortunat que j'ai intégrée dans de nombreux articles du blog. Elles ont également contribué à améliorer presque tout le texte français du blog (et les articles d'album du 150e anniversaire) depuis on se rencontre pour la première fois en 2016.

Anita, Jeanne d'Arc, Cécile et moi sommes liés par le patriarche et la matriarche de la famille Demers qui s'est installée à Saint-Fortunat en 1859, Damase Demers et Euphrasie Lamontagne. Jeanne d'Arc et Cécile, qui sont les deux sœurs, sont les arrière-petites-filles de Damase et Euphrasie, je suis un arrière-arrière-petit-fils, et Anita est une arrière-arrière-arrière-petite-fille. Bien que les relations familiales de nous quatre soient plutôt éloignées, nous avons noué des amitiés étroites au cours des cinq dernières années en travaillant sur des projets de recherche sur notre famille, notamment des visites chez les deux sœurs de Victoriaville et de Saint-Fortunat.

Enfin, des cousines encore plus éloignées - et amies, aussi - Suzanne Demers et Johanne Demers, ont fourni une aide précieuse pour les textes français des articles d'album. Suzanne et Johanne sont des membres très actives de l'Association des familles Demers, Inc., basée à Québec, et sont membres de son conseil d'administration. Je les remercie toutes, Anita, Jeanne d'Arc, Cécile, Suzanne et Johanne, pour leur aide et leurs encouragements dans ma quête pour en savoir plus sur l'histoire québécoise de la famille.

Dennis Doiron, Gardiner, Maine

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Saint-Fortunat, Québec. Octobre, 2017. L'église, avec son clocher blanc, est montrée au centre de la photo. Il a été construit à partir de 1872 et la première messe y a eu lieu vers Noël 1873. Cette vue du village est près du début du chemin du 6e rang. Les terres de la famille Demers se trouvaient à environ quatre kilomètres au nord-ouest (ou à droite de la photo). (Photo: Dennis Doiron)
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La famille Demers du chemin du 6e rang

Le premier maire de Saint-Fortunat, Télesphore Demers, devenu âgé, disait souvent à ses petits-enfants que son père Damase fut le premier canadien à abattre des arbres à la hache sur les lopins de terres familiales sur les lots 4 et 5 du 6e rang et le lot 4 sur le 5e du chemin du 6e rang. Certains de ces champs que Damase et d'autres membres de la grande famille Demers ont défrichés à partir de 1859 sont encore visibles aujourd'hui, mais pas un seul descendant de la famille reste-là aujourd'hui. Qui était cette famille et qu'est-ce qu'elle est devenue?

Dans les premières années, leur nouvelle ferme se trouve dans la paroisse de Saint-Julien-de-Wolfestown, mais plus tard elle se retrouve dans la paroisse et la municipalité de Saint-Fortunat. Vers 1917, Télesphore écrivait une brève description de l'isolement du chemin du 6e rang dans leurs premières années :

Mon père a vendu sa ferme pour s'installer à Saint-Julien-de-Wolfestown dans les Cantons-de-l'Est. Elle était à trois milles dans la forêt, à cinq milles sans route, à neuf milles des magasins de Saint-Ferdinand-d’Halifax et à six milles de la chapelle de Saint-Julien. Le prêtre d'Halifax se rendait en mission à Saint-Julien toutes les deux semaines.

Damase et Euphrasie ont inspiré d'autres membres de la famille Demers à les suivre jusqu'au chemin du 6e rang et sont ainsi devenus le patriarche et la matriarche d'une grande famille élargie. Il s'agissait en plus d’Hilaire Aubin, leurs autres neveux Honoré et Évangéliste (fils de Germain Demers), et Barthélemy Aubin (comme son frère Hilaire, un beau-fils par alliance de Germain). Presque tous les membres en dessous de la jeune génération de Demers cultivaient leurs propres terres et élevaient leurs familles au Chemin du 6e rang dans les années 1860, 1870, ou 1880. 

Les enfants de Damase et Euphrasie Demers étaient:

  • Théodore (1839 - 1938) épousa Philomène Lamontagne (une cousine au second degré) en 1862 et eurent 13 enfants (dont six au recensement de 1871), l’an quand la paroisse de Saint-Fortunat été établie;
  • Marie Euphrasie (1840 - 1923) épousa son beau-cousin par alliance Hilaire Aubin (1830 - 1903) à Saint-Gilles en 1856 et eurent 13 enfants (dont six au recensement de 1871);
  • Damase, fils, (1842 - 1911) épousa Rebecca Lantagne en 1864 et eurent huit enfants (dont quatre au recensement de 1871);
  • Télesphore (1847 - 1950) épousa Henriette Lamontagne (une cousine au second degré) en 1869 et eurent 13 enfants (dont un au recensement de 1871);
  • Louis-Ferdinand (1849 - 1942) épousa Marie-Sabrina Paradis à Saint-Raphaël en 1870 et eurent neuf enfants (il semble avoir vécu à Saint-Raphaël après son mariage);
  • Louis Octave-Alexis (1856 - 1866) est décédé en 1866 à l'âge de neuf ans; et
  • Delvina (1858-1945) épousa Joseph Bourassa en 1888 et eurent sept enfants.

Le neveux de Damase et Euphrasie et leurs familles étaient :

  • Honoré (1842 - 1920) épousa Victoria Lamontagne en 1865 et eurent 11 enfants (dont trois au recensement de 1871);
  • Évangeliste (1839 - 1892) épousa Adélaïde Boucher en 1866 et eurent dix enfants (dont deux au recensement de 1871);
  • Barthelémi Aubin (1832 - 1903), un beau-fils de Germain Demers, épousa Elisabeth Dupere en 1860 et eurent neuf enfants (dont quatre au recensement de 1871).
Les membres de la famille Demers participaient activement à la vie de la communauté grandissante. Beaucoup étaient signataires des pétitions visant à créer une nouvelle paroisse en 1871 et à former une nouvelle municipalité en 1873, et furent plus tard actifs dans les affaires de la paroisse, de la municipalité et de l'école. Télesphore, à 25 ans, fut le premier maire de la nouvelle municipalité en 1873, un président de la commission scolaire, et, plus tard, un juge de paix, et d'autres Demers et Aubins siégeront aussi aux conseils municipaux, commissions scolaires et à la fabrique de la paroisse.

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Cette photo de la famille de Télesphore Demers et Henriette Lamontagne, qui était une fille de Simon Lamontagne et Marie Madeleine Legendre, fut prise vers 1888. Après la mort de son père, Damase, en 1871, Télesphore a hérité sa terre. En plus d'Henriette et Télesphore, cette photo montre tous leurs enfants survivants qui sont nés au Chemin du 6e rang. Assis dans la première rangée : Éva (née en 1879) ; Henriette (née au Chemin de 15 lots à Saint-Ferdinand-d'Halifax en 1851) ; Phidelem (né en 1887) ; Télesphore, père (né à Saint-Gilles-de-Beaurivage en 1847); Donat (né en 1885) ; et Émile (né en 1877). Debout dans la deuxième rangée : Lydia (née en 1873) ; Andréana (née en 1881) ; Odélie (née en 1871) ; Virginie (née en 1875) ; et Télesphore, fils (né en 1869). Une de leurs enfants, Mélanie, née en 1884, est décédée en 1888, et leurs jumelles, Marie Claudia Melonie Regina (1889-90) et une anonyme mort-née (1889), étaient aussi décédées avant cette photo. Leur dernier enfant, Odias, été né à Sanford, dans le Maine, en 1894. Les parents et tous leurs enfants vivront en permanence aux États-Unis à partir de 1890, sauf Télesphore, fils, qui revient au Québec à La Doré dans la région de Saguenay-Lac Saint-Jean, puis à Montréal.
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En 1871, Damase est décédé à la suite d’un accident de labour sur sa terre. Peu de temps après, l'exode des Demers de Saint-Fortunat vers les États-Unis ou ailleurs au Canada a commencé. Le premier à partir fut Louis-Ferdinand en 1875 lorsqu'il émigra à Jefferson, dans le Dakota du Sud. Viennent ensuite Damase, fils, et sa femme, Rebecca, et leur famille de six enfants qui sont partis pour le Minnesota en 1878 ou 1879. Au début des années 1880, Marie Euphrasie et son mari, Hilaire Aubin, et six de leurs enfants ainsi que leur neveu Joseph, forgeron et fils aîné de Théodore, ont déménagé à Lewiston, dans le Maine, pour y travailler dans les usines et scieries. À peu près à la même époque, Évangéliste Demers et sa femme et sept enfants ont également déménagé à Lewiston, tout comme Théodore Demers et sa femme Philomène et leurs autres enfants en 1884. À la fin des années 1880, Honoré Demers et sa femme Victoria, et leurs neuf enfants, ont déménagé pour travailler dans les usines et les scieries de Sanford, dans le Maine. Après le mariage de Delvina, la fille cadette de Damase et Euphrasie, avec Joseph Bourassa en 1888, le couple déménage à Crystal Falls, dans le Vermont. Lorsque Euphrasie, la matriarche de la famille et veuve de Damase, mourut en 1890, la famille de son fils Télesphore était la seule dans la famille vivant toujours au chemin du 6e rang, mais elle aussi émigra à Sanford, dans le Maine, quelques mois après la mort d’Euphrasie.

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Théodore, le fils aîné de Damase Demers et d'Euphrasie Lamontagne, épousa  Philomène Lamontagne en 1862 à Saint-Ferdinand-d’Halifax. Après leur mariage, ils ont cultivé une terre sur le chemin du 6e rang, puis ont immigré à Lewiston, dans le Maine, vers 1883 où ils sont restés en permanence. Cependant, plusieurs de leurs enfants sont revenus définitivement au Québec. Leur fils aîné, Joseph, est devenu un homme d'affaires très prospère à Auburn, dans le Maine, en tant que propriétaire de la Auburn Carriage Company, qui y a été fondée en 1905. En 1908, son oncle Télesphore Demers écrivait dans son carnet de voyage sur sa visite dans l'entreprise:
 
À dix heures du matin, nous sommes allés au commerce de Joseph. Il nous a fait visiter tout l'établissement - la forge, les magasins de bois et de peinture, ainsi que le magasin de wagons. C'est un bâtiment de quatre-vingt-cinq pieds sur quatre-vingt sur quatre étages. 

Théodore, comme deux de ses frères, a eu une longue vie, mourant à 98 ans. Son frère Louis-Ferdinand a vécu jusqu'à 92 ans et Télesphore jusqu'à 102 ans.

Cette photo fut prise à Lewiston, dans le Maine, vers 1890. Assis: Philomène, 47 ans en 1890 (1843-1913); Herménégilde, 11 ans (1879-1965); Théodore, 51 ans (1839-1938); Angélina, 9 ans (1881-1918); et Joseph, 25 ans (1865-1939). Debout: Napoléon, 17 ans (1873-1916); Pierre (dit « Pétrus »); 12 ans (1878-1959), Marie Delvina, 21 ans (1869-1941) et Exélia, 15 ans (1875-1967).
 
Enfants décédés: Marie Philomène (1863-1886), Octave Noël (1866-1868), Amanda (1871-1877), Arthur Adelard (1882-1882), Ephrem Eustache (1883-1884), et Marie Rose Émilina (1888-1888).
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Vers 1890, une migration inverse a commencé.  Honoré Demers et Victoria Lamontagne et leurs enfants reviennent au Québec (à Saint-Samuel-de-Dorset, aujourd'hui Lac-Drolet) au début des années 1890. Peu de temps après, leur fils aîné, Télesphore, a possédé et exploité sur une longue période la scierie qui est aujourd'hui le Moulin des Pionniers de La-Doré, un musée vivant dans la région du Lac-Saint-Jean. 

Au début des années 1890, la fille aînée de Damase et Euphrasie, Marie Euphrasie, est revenue à Saint-Fortunat avec son mari, Hilaire Aubin. Ils y vivront jusqu'à la mort de celui-ci en 1903 (il est enterré près de sa belle-mère dans le vieux cimetière), après quoi elle vécut avec sa fille Délienne à Berlin, dans le New Hampshire. Delvina, la sœur de Marie Euphrasie, retourna à Saint-Fortunat en 1891 et éleva sa famille avec son mari, Joseph Bourassa, sur une terre du 7e rang au sud du village. Tous deux ont vécu à Saint-Fortunat jusqu'à leur mort dans les années 1940 et sont enterrés à côté de la mère de Delvina dans le vieux cimetière. En somme, après les migrations, un petit peu d’enfants et petits-petits enfants de Damase et Euphrasie, notamment ceux d'Angélina Bourassa et d'Elzéar Leblanc, continueront à vivre à Saint-Fortunat jusqu'au milieu du XXe siècle.

Les descendants de la grande famille Demers du chemin du 6e rang, comme les descendants de tant de premiers colons du canton de Wolfestown vivent maintenant entièrement dans d’autres régions du Québec, ailleurs au Canada et aux  États-Unis, en particulier en Nouvelle-Angleterre. Néanmoins, la famille Demers a laissé derrière elle à Saint-Fortunat un héritage dans l'établissement de la paroisse et de la municipalité de Saint-Fortunat et dans les nombreux champs défrichés qui subsistent aujourd'hui dans la partie nord-ouest du Chemin du 6e rang.
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